Ne plus gaspiller l’eau potable

Les pistes écologiques de Patrice Ey pour ne plus gaspiller l’eau potable

Alors que l’on manque cruellement d’eau à certaines périodes de l’année, des milliers de mètres cubes d’eau douce partent à la mer lors d’épisodes pluvieux. Un agriculteur, installé à Torreilles, imagine un système vertueux pour équilibrer les choses.

NICOLAS PARENT

Depuis 20 ans, Partice Ey est producteur de légumes bio (ce fut un des premiers à populariser la démarche) et éleveur de volailles. Ses installations se trouvent sur la commune de Torreilles et occupent 70 hectares, dont 25 de bâtiments.

« Ces terrains sont inondables, confie l’agriculteur. Lors des dernières fortes pluies nous avons été en partie noyés, mais nos installations sont prévues pour, les poules ont des perchoirs pour ne pas se retrouver dans l’eau. Une eau qui manque en été pour faire pousser les céréales nécessaires à l’alimentation de nos volailles. C’est devant cette incohérence que je me suis mis à réfléchir sur un système qui permettrait d’équilibrer tout cela. »

Un bassin recouvert de panneaux photovoltaïques

On connaissait les bassins d’orage, Patrice Ey voit des bassins de stockage bien plus importants, bassins alimentés par le déversement du chenal évacuateur de crue lors de fortes pluies. « Ici en Salanque, c’est assez aisé à réaliser, poursuit-il. Nous sommes dans une zone plate et surtout l’eau que nous capterons ne manquera pas en aval, puisqu’elle se jette dans la mer. Au contraire cela peut ralentir un risque d’inondation au niveau du littoral. »

Mais le projet étudié par l’agriculteur ne s’arrête pas là. L’idée est de stocker dans un premier temps l’eau, dans un grand bassin recouvert en partie par des panneaux photovoltaïques. Le courant ainsi produit va actionner des pompes pour que cette eau soit dirigée vers un second bassin destiné à son épuration.« L’eau qui est récupérée sera certainement chargée de diverses pollutions d’intrants agricoles ou plus certainement par l’urbanisation, estime l’agriculteur. Dans ce second bassin, sorte d’éco-station d’épuration, elle va devenir compatible avec un arrosage de céréales en bio. »

L’autre intérêt réside en ce que ces bassins secondaires, plantés de végétaux épurateurs, formeront un écosystème idéal pour les oiseaux, les batraciens, les insectes pollinisateurs, ou encore les chauves-souris. « D’une contrainte naturelle, celle d’une zone inondable, insiste Patrice Ey, nous pourrons créer un atout agronomique. Au lieu d’un simple contenant pour le stockage de l’eau nous allons développer un véritable écosystème cohérent, un poumon écologique. »

Mais l’objectif final est bien d’utiliser cette eau devenue pure pour arroser les cultures destinées ici aux volailles. Actuellement, comme pour les autres productions locales, c’est l’eau des nappes souterraines qui est utilisée. « Nous voulons anticiper les choses, poursuit l’agriculteur. Avec ce projet cohérent et vertueux qui peut aussi servir à plusieurs exploitations, on pallie trois problèmes. Celui du risque d’inondation, la sécurisation de la ressource en eau, et la préservation des nappes souterraines. »

C’est aussi pourquoi au cours de l’opération Le Monde Nouveau de cette année, ce projet à été remarqué par le Créathon. Une première marche vers la réussite.

La région intéressée

Une délégation d’élus régionaux est venue dernièrement sur place à Torreilles pour constater la pertinence du vaste projet de Partice Ey. Une réunion est d’ores et déjà programmée avec les élus locaux, les représentants des services de l’Etat  et les administrations en lien avec l’urbanisme, la gestion de l’eau, l’agriculture. Les barrières techniques, administratives et financières seront étudiées. Patrice Ey estime que les premières études hydrauliques sur le terrain devraient être lancées en début d’année.

 

Denis Dupont